10 avril 2014

Vive La Dolce Vita des travailleurs !


Je ne sais si Lucy Mangan, chroniqueuse au Guardian, est contente pour nous ou un peu jalouse.

Dans un article elle alerte ses compatriotes anglais : syndicats et patronat français ont voté le 1er avril un accord de branche pour une "obligation de déconnexion" de 11 heures par jour et le week-end pour les cadres et managers dans les sociétés d'ingénierie et de conseil. Il s'agit de réguler le temps de travail "en ligne" (ordres par emails, SMS...) jusqu'ici non comptabilisé (gains à court terme pour la boîte, mais source de burn-out pour l'employé et au final, perte pour la boîte). 

Que l'on ne soit pas connecté en 24 / 24 avec son entreprise, déjà que le temps de travail est limité à 35 heures chez nous, cela interpelle l'éditorialiste britannique qui y voit une obligation nationale de "Dolce Vita" (sic, mais euh c'est un film italien madame). Les drogués au travail ne pourront plus s'épanouir dans l'hyperactivité, prendre leur dose d'ordre, et seront forcés d'avoir du temps pour eux, voire une vie privée. Où va-t-on ? Vers un peu plus de bonheur surement. Pas coté en bourse, donc pas au programme. 

Remettons les choses dans l'ordre. Entre les douze pauses clope par jour et les terrasses de pub bondées de salariés dès quatre heures, L'Angleterre a beaucoup à apprendre à La France au niveau glande au bureau. De ma petite expérience, le salarié français est bien plus productif que son collègue en anglais, bien plus déprimé aussi. No shit Sherlock ! N'y aurait-il pas un lien entre les deux ? 

Deuxièmement, cette mesure est un accord (et non une loi) de "riches". Ça ne concerne que certaines sociétés orientées high-tech, des indépendants et des cadres sup. Ça ne touchera pas le manutentionnaire ou la caissière. Eux peuvent continuer à trimer à la demande, à horaires découpés et décalés, et pourront continuer à jouir des progrès de la technologie en apprenant au beau milieu de la nuit et sans avoir à bouger de la banquette arrière de la 307, leur licenciement par SMS.

Reste que cet accord, et c'est rare par les temps qui courent, passe presque pour un progrès social juste parce que n'est pas un recul (alors qu'il s'agit juste de garantir que les journées de boulot ne fassent pas 20 heures). Dans la ligne, c'est même subversif à une époque où le travail se doit d'être considéré comme "une valeur" à laquelle il faudrait tout sacrifier, l’identité première de l'individu, la seule voie pour une vie épanouie.

Illustration : La Dolce Vita, Fellini (1960).

Seb Musset, L'abondance. 
+ d'infos
Disponible ici en papier ou ebook.


2 comments:

t0pol a dit…

Tu as été rapide.

MadMax a dit…

Attendez. Je finis mon mail pour le boulot et je commente cet article juste après...

Top Ad 728x90